LE RÊVE

4 heures du matin... je suis en avance sur l’horaire. Je viens de me faire le premier café. J’ai fait un rêve qui m’a réveillée. Je pleurais. Ça faisait longtemps que je n’avais pas pleuré dans mon sommeil.

J’ai rêvé que j’allais au spectacle. Que la salle était pleine. Je faisais des coucous de loin aux amis déjà installés. J’embrassais ceux que je croisais. Ça piaillait. Riait. Dans l’air, cette petite impatience de la découverte. Cette délicieuse petite boule au ventre qu’on a juste avant de partir en voyage.

Je prends place. Je n’attache jamais ma ceinture pour ce genre de voyage. Je veux être soumise aux turbulences. Secouez-moi! Faites-moi quitter le plancher des vaches. Donner de l’air à mon imagination. Faites frissonner ma peau. Aérez mon cerveau.

Je ne sais plus ce que j’ai vu... je sais juste que vous étiez toutes et tous présents. Que vous preniez possession de l’espace. Que les corps ondulaient. Les mains se frôlaient. Les bouches se dévoraient. Les mots jaillissaient. Les notes de musique résonnaient. J’en tremblais.

 Je me suis réveillée avant les applaudissements. Sans être arrivée à destination. Juste le goût du plaisir en bouche. Mes yeux imprimés sur mon oreiller.

Je parle avec beaucoup d’entre vous depuis quelques semaines. Je m’inquiète pour vous. Je prends de vos nouvelles. Je veille à ce que vos frigos ne soient pas vides. Et la plupart du temps, c’est vous qui me réconfortez. Comme vous le faites depuis que je suis enfant. Vous me sauvez du désespoir, comme vous avez sauvé l’enfant battue par ses camarades que j’étais. Vous m’encouragez à écrire, à chanter... ça faisait tellement longtemps que je n’avais pas chanté. Je n’aurai jamais assez de mots pour vous dire à quel point je vous aime. Jamais.

Je me sens bien impuissante en ce moment. J’aimerais pouvoir soulager vos incertitudes, vider vos têtes des soucis pour que ne puissent y fleurir que des envies de créations. Certains parmi vous ont été époustouflants ces dernières semaines. Imaginatifs. Sensibles. Remplis d’humour et de recul, bien que la situation soit catastrophique. Je vous admire pour cette force-là.

Ne perdez pas espoir. Même si à moi toute seule je ne peux payer vos loyers, vous nourrir, vous donner des espaces de créations libérés des contraintes sanitaires, sachez que je serai toujours passagère de vos vols longs-courriers.

Vous me manquez énormément, vous qui êtes si essentiels à mon équilibre.

Je n’attacherai jamais ma ceinture...

Stéphanie Tschopp

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